14/09/2019

#LeSensDesMots épisode 1 : « inspirant »

Avez-vous remarqué que depuis quelques années, des noms de gens plus « inspirants » les uns que les autres circulent ? Sur les réseaux, dans les articles, dans les conversations. « Tu devrais rencontrer ce type, il est INSPIRANT », « Lis cet article, l’auteur est INSPIRANT ! »  Mais, en vrai, ça veut dire quoi « inspirant ? » Retournons aux fondamentaux : le dico, mais aussi, dans un autre genre, ce que nous enseigne la vie.

Dis, larousse, « inspirant », ça veut dire quoi ?

« Inspirant » : propre à inspirer, à donner de l’inspiration.
Ok. Merci Larousse, nous voilà bien avancés. Allons-voir maintenant le verbe.
« Inspirer » : Créer chez quelqu’un, en particulier chez un artiste, un état privilégié qui favorise la création, l’imagination, l’invention.
Voilà qui est plus intéressant !

Les pouvoirs de l’individu dit inspirant

Il s’agirait, semble-t-il, pour inspirer, d’être capable de :

  • Plonger l’autre dans un « état particulier » (sans recourir à des substances illicites)
  • Cet état ayant la particularité de faire naître quelque chose chez l’autre.

Les « gens inspirants » seraient ceux qui, d’une façon ou d’une autre, susciteraient en nous quelque chose d’inédit : une réflexion, une envie, une émotion par exemple. Mieux encore, cette « petite graine » pourrait parfois germer et nous conduire à transformer nos vies, à plus ou moins grande échelle (je pense là à un changement de comportement ou d’avis, ou encore à une prise de décision).

Jusque-là, vous adhérez à la définition ? Parfait. Sauf qu’il manque un truc à prendre en considération. La définition apporte en effet une précision…

Inspirer, c’est créer « chez quelqu’un »

Le voilà, le truc, qui m’ennuie lorsqu’on affirme ça et là qu’untel est INSPIRANT !

PERSONNE n’est inspirant de façon universelle et absolue.
Et, pourtant, TOUT LE MONDE a le potentiel pour inspirer ce quelqu’un dont nous parle la définition. D’où je tiens ça ? Du dico, mais pas que.

 

DIS, la vie, ça veut dire quoi « inspirant », en vrai ?

J’adore la vie. Parfois, elle vous met une sacrée claque sur le sens qu’on peut ou qu’on veut mettre derrière les mots. Ma claque d’inspiration, je me la suis prise au travers de deux rencontres très différentes, à quelques jours d’intervalle.

La première, c’était avec une femme qui s’appelait Simone.

J’étais étudiante et me suis retrouvée à l’écouter avec le reste de ma promo dans son bureau, au Conseil Constitutionnel.
Simone nous a parlé de justice, d’Etat de droit, d’Europe. En fait, je ne sais plus très bien, parce que mon attention a vite été happée par l’énergie très particulière qu’elle dégageait, tant dans sa posture que dans le choix des mots.
Je suis ressortie un peu sonnée de ce bureau, avec un sentiment diffus. L’envie d’être plus forte, de me battre pour ce que je trouvais juste, d’améliorer ma résilience.

Quelques jours plus tard, j’ai rencontré Pablo, au pont des Arts.

Pablo n’avait pas un sou en poche, mais une guitare et de la bonne humeur à revendre. Nous avons parlé un peu, dans un anglais approximatif.  Pablo ne m’a rien demandé, m’a expliqué pourquoi il aimait regarder les gens et m’a proposé de partager le si peu qu’il avait. Je l’ai souvent croisé ensuite, et chaque fois, j’ai observé sa capacité à ne pas reporter sur les autres la situation dans laquelle il se trouvait, et à rester joyeux.

Que sont devenus ces deux êtres lumineux ?

Pablo, dont je n’ai jamais su le nom, vivait dans la rue. J’ai appris quelques années plus tard qu’il avait été poignardé, et inhumé dans un cimetière parisien, loin de son Argentine natale.
Simone, elle avait et a toujours un nom, que vous aurez deviné, et repose au Panthéon, après un hommage national.

Deux destins fort différents donc, mais qui ne changent rien à ma perception. Pablo et Simone Veil m’ont tous deux donné envie de m’améliorer, de m’élever, de voir plus grand, plus beau, de croire en des choses et de me battre pour elles. Ils m’ont tous deux inspirée. Cela ne s’explique pas, ça prend aux tripes.
Et les tripes (en tous cas les miennes) se fichent pas mal de l’anonymat ou de la notoriété de celles et ceux qui viennent les chatouiller.

CONCLUSION ?

Là, c’est en principe le moment où vous vous dites « Eh oui, l’habit ne fait pas le moine ».
Oui, il y a de ça dans le propos, parce que ce n’est effectivement pas le coup de projecteur qui suffit à déclencher l’inspiration.
Le préalable, avant de pouvoir se dire inspiré, c’est d’écouter et d’observer. Ce que disent et ce que font les autres évidemment, mais aussi ce que ces actions et discours provoquent en nous.

Parfois, l’inspiration est là, parfois non.

C’est la magie du phénomène. Il ne se commande pas. Autant donc le guetter, en ouvrant nos yeux et nos oreilles.
Je vous parle là de nos futures rencontres mais aussi de toutes celles et ceux qui, sans être dans la lumière, peuplent notre quotidien.

Nos enfants, nos parents, nos proches, nos amis.
Nos collègues, nos salariés, nos managers.
Nos fournisseurs, nos prestataires, nos clients, nos concurrents.
Tous ces gens qui, si nous leur prêtons attention, ont peut-être un discours ou un comportement susceptible de faire naître quelque chose de nouveau.

D’ailleurs, peut-être que vous aussi, vous êtes inspirant.

Ou plus exactement, que vous pouvez conduire quelqu’un à dire de vous que vous l’êtes.
Vous êtes prêt ? Alors, 1, 2, 3…INSPIREZ !
Non, je rigole.
Soyez comme vous êtes, laissez les autres vous observer et ça se fera tout seul si ça doit se faire, sans même que vous vous en rendiez compte.

Photo : unsplash / Jerry Zhang